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samedi 29 juin 2013

Pour Mandela: Jouer le jeu de Félix Eboué



L’émotion suscitée par la mort imminente de Nelson Mandela est à la mesure du personnage. Le leader sud-africain est une des personnalités marquantes de notre époque, de notre monde. Son combat et celui de son peuple nous concernent et nous touchent tous. Difficile de faire le tri parmi ses innombrables qualités : Courage, ténacité, tolérance, humanité, pragmatisme, intelligence, un formidable charisme. Avoir été emprisonné dann un bagne le quart de sa vie d’adulte, ne jamais abandonner, en ressortir victorieux sans oublier mais sans haine, montrer l’exemple en traquant la corruption jusque chez ses proches, être à ce point démocrate qu’on ne s’accroche pas au pouvoir alors que l’on pourrait être réélu à vie. Nelson Mandela est un tpe impeccable, zéro défaut. Et il n’est pas honnête de vouloir amoindrir l’éloge de ses qualités en ajoutant que l’Afrique du sud connaît des difficultés importantes se traduisant notamment par une violence et une insécurité records ! Sous-entendu en fait : « Les noirs ont voulu le pouvoir, ils l’ont eu, et c’était normal, mais voyez ce qu’est devenu ce pays ! » Quelle hypocrisie ! La violence dans les rues de Johannesbourg n’est pas plus élevée que dans celles de Rio de Janeiro, et pourtant nous rêvons tous de Copacabana et du carnaval. Et puis, comment aurait-il été possible de sortir d’un siècle d’aparheid en quelques mois ? Comment était-il imaginable d’intégrer dans l’économie sud-africaine 40 millions de noirs qui en avaient été soigneusement exclus au profit de 4 millions de blancs ? Comment former les cadres et les élites de demain à patir d’une population si longtemps interdite d’éducation ? Comment apprendre la démocratie quand on sort de siècles de dictature ? Comme réconcilier les oppresseurs, parfois même les tortionnaires, avec les oppressés d’hier en un claquement de doigts ?
Nelson Mandela restera comme un marqueur du progrès de nos sociétés vers plus de liberté, plus d’égalité, plus de fraternité.
Comme le fut, toutes proportions gardées, Félix Eboué. Une de nos grandes figures, certes panthéonisée, mais trop oubliée dans notre mémoire nationale. Ce guyanais, premier noir gouverneur de l’empire colonial français jusqu’à devenir gouverneur général de l’Afrique équatoriale, le premier à se rallier au général De Gaulle , le premier à faire basculer une partie de l’empire dans le camp de la France libre, à recruter, former, armer les premiers contingents des forces armées françaises libres, mais aussi l’organisateur de la Conférence de Brazzaville en 1944 qui jeta les bases de ce qui allait être la décolonisation, le haut-fonctionnaire français, admirateur des valeurs de notre République, au nom desquelles il dénonçait la violence du système colonial, et sans jamais oublier ses origines, lui le descendant d’esclaves déportés d’Afrique.
Nelson Mandela aurait pu écrire le discours prononcé par Félix Eboué en 1937 à la jeunesse de la Guadeloupe, dont il était le premier gouverneur noir : « Jouer le jeu »[1] : 
« Jouer le jeu, c'est, par la répudiation totale des préjugés, se libérer de ce qu'une expression moderne appelle le complexe d'infériorité. C'est aimer les hommes, tous les hommes, et se dire qu'ils sont tous bâtis selon la commune mesure humaine qui est faite de qualités et de défauts.(…) Jouer le jeu, c'est respecter l'opinion d'autrui, c'est l'examiner avec objectivité et la combattre seulement si on trouve en soi les raisons de ne pas l'admettre, mais alors le faire courageusement et au grand jour.
Jouer le jeu, c'est respecter nos valeurs nationales, les aimer, les servir avec passion, avec intelligence, vivre et mourir pour elles, tout en admettant qu'au delà de nos frontières, d'authentiques valeurs sont également dignes de notre estime, de notre respect. C’est (…) comprendre alors que tous les hommes sont frères et relèvent de notre amour et de notre pitié.(…) C'est trouver autant d'agrément à l'audition d'un chant populaire qu'aux savantes compositions musicales. C'est s'élever si haut que l'on se trouve partout à son aise, dans les somptueux palais comme dans la modeste chaumière de l'homme du peuple; c'est ne pas voir un excès d'honneur quand on est admis là, et ne pas se sentir gêné quand on est accueilli ici; c'est attribuer la même valeur spirituelle au protocole officiel, à l'académisme, qu'au geste si touchant par quoi la paysanne guadeloupéenne vous offre, accompagnée du plus exquis des sourires, l'humble fleur des champs, son seul bien, qu'elle est allée cueillir à votre intention. »
Eboué-Mandela : même combat !
Nous vivons une e-poque formidable !

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